histoire
Chapitre premier, family guyMr and Mrs McKinnon se sont rencontrés sur les bancs de la fac de Dundee, Moira était étudiante en biologie, Stuart était le joueur fétiche de l'équipe de rugby de la fac. Ils ont été le couple modèle pour toute leur promotion. Lors de leur dernière année de faculté, Moira s'est retrouvée enceinte, Stuart a abandonné, sans amertume ses rêves de carrière de rugbyman professionnel, et est simplement devenu coach. Moira a trouvé un poste de biologiste à l'hôpital de la ville. Ils ont acheté un joli petit cottage en extérieur de ville. Et Lewis est né. Stuart voulait en faire son champion de rugby, mais s'est bien vite rendu compte que ça ne serait pas une mince affaire. Le petit était du genre maladroit et un peu paresseux, tout le contraire de son père.
Trois ans plus tard, naquit la petite Bonnie. L'entente était très bonne entre Lewis et sa petite sœur, il développa instantanément ce sentiment de responsabilité si particulier au grand frère. Ce qu'il avait du mal à comprendre, c'est que Bonnie n'avait pas besoin d'être protégée, elle se débrouillait très bien toute seule. C'est le genre d'enfant dont on sait qu'il va faire de grande chose.
Deux ans après, ce fut le tour de Blair. Troisième enfant, deuxième fille. Moira était ravie, Stuart désespéré de ne pas trouver un digne héritier du rugby, Lewis toujours content d'avoir une nouvelle petite sœur à s'occuper. Cependant, Bonnie, quant à elle, vécue assez mal qu'on lui vole sa place de petite dernière. Mais si elle savait, ce n'était pas encore fini.
Encore deux ans plus tard, ce fut Effie qui vit le jour. Encore une fille. Stuart commença même à googler "comment faire des garçons". Moira était aux anges. Lewis commençait à perdre patience. Il avait sept ans et ses petites sœurs étaient du genre turbulentes. Bonnie rouspétait, Blair faisait la folle, Effie ne faisait pas ses nuits. Et c'est vrai que la famille McKinnon commençait à être à bout de souffle. Jurant que c'était leur quatrième et dernier enfant, ils essayèrent de trouver un équilibre.
Mais quatre ans plus tard, comme un cheveu sur la souple, ce fut Lily. L'accident, la dernière fille. Dépité, Stuart pris rendez-vous pour une vasectomie.
Mais les McKinnon, leur fils et leurs quatre filles étaient pourtant une famille unie. Certes la place manquait un peu au cottage, mais tout ce petit monde vivait en équilibre. Lewis, l'aîné, devint responsable un peu trop tôt. Mais quand on a quatre petites sœurs, vaut mieux. Cependant, il était épaulé par Bonnie, le sergent de la fratrie.
En dehors du foyer, Lewis n'était pas vraiment une star. Plutôt classé d'avance dans les "loser" il eut une scolarité banale : c'est à dire infernale. Il ne réussit jamais à sortir avec la fille de ses rêves, n'intégra pas d'équipe de sport mais plutôt le club d'écriture, n'eut jamais des notes exceptionnelles sans pour autant être dans les mauvais élèves...
Chapitre second, freedomEn réalité, Lewis eut l'impression d'une renaissance lors de son départ pour la fac. Loin du bruit quasi-constant de quatre sœurs, des crêpages de chignons, des histoires de cœur. A 18 ans, diplôme en poche, il partit donc à l'université de Dundee pour étudier les lettres. Car c'était un littéraire. Rien ne valait un bon bouquin pour oublier ses sœurs envahissantes. Evidemment ça ne fit pas vraiment la fierté de sa mère scientifique, ni de son père sportif. Mais, dans une allée de la bibliothèque de la fac, le nez plongé dans un bouquin sur les langues antiques, ou bien dans sa minuscule chambre du campus Lewis était enfin chez lui. Et puis, vous savez ce qu'on dit, les souffre-douleurs du lycée s'épanouissent à la fac. Lewis se fit des amis, de vrais amis. Commença enfin à sortir, faire la fête, rencontrer des filles canons. Honnêtement, ce fut les meilleures années de sa vie. Enfin, sauf la dernière année, quand Bonnie -qui évidemment avait sauté une classe- entra elle aussi à l'université. Elle attira toute l'attention sur elle, et Lewis l'écrivain en herbe légèrement défoncé à la weed devint Lewis, le grand frère de Bonnie, qui elle était Bonnie, la fille parfaite. Major de promo, belle à mourir, autoritaire et déterminée.
La faculté terminé, Lewis, 22 ans, pris une année sabbatique. Enfin, il travaillait dans un café-théâtre en tant que serveur, mais sa véritable vocation, se fut l'écriture. Et à la fermeture du café, il s'installait sur l'une des tables avec son ordinateur portable pour écrire son histoire. Qui parlait évidemment d'un type qui avait quatre sœurs difficile à gérer. La surdouée, la baba cool, la rebelle et la reine des cœurs. Ce fut également des années sympa, un peu du n'importe quoi sans être dans l'excès. Il vivait dans le petit appartement au-dessus du café et était bien dans ses baskets.
Chapitre troisième, all you need is loveElle était une actrice en herbe, Londonienne venue vivre son rêve d'aventure en Ecosse -bah oui, les Loch Ness c'est une aventure non?- elle vint un soir de scène ouverte au café-théâtre proposé son one-woman-show. Elle fit mourir de rire Lewis. Cette fille, c'était Lana. On peut dire que ce fut le coup de foudre. Lewis n'hésita pas à plaquer son rencard de l'époque -une dénommée Georgina- pour elle. Il l'emmena voir Love Actually au cinéma cette année-là, en 2003, ils s’embrassèrent à la fin. Lewis fit même tomber les pop-corn sur la vieille de devant. Lana et Lewis, ce fut un couple parfait au départ.
Bon, par contre, elle ne plut pas forcément aux sœurs McKinnon. Et ce fut rapidement un frein énorme à l'avancée de leur relation. Quand ils voulurent emménager ensemble au bout de trois ans ensemble, Bonnie fit la liste des pour et des contre avec 90% des arguments dans les contre, Blair se contenta d'exploser de rire, Effie piqua une crise et Lily essaya de convaincre son frère de plaquer Lana pour sortir avec sa copine Diana de 15 ans. Lana et Lewis n'emménagèrent qu’un an plus tard. Quand ils parlèrent mariage, ce fut exactement la même chose. Et Lewis n'attendit que ses trente ans pour la demander en mariage. Et si tout ceci était très dur pour Lana, Lewis lui, appliquait sa méthode préférée : la méthode de l'autruche, comme si de rien n'était.
Il avait de toute façon d'autres choses en tête, la même année que celle de ses fiançailles il mit enfin un point final à son roman :
FOUR SISTERS. Un éditeur accepta même de l'engager. Sans parler de bestseller, le roman eut un petit succès en Ecosse. Ni une ni deux, Lewis quitta son boulot au café-théâtre et commença à se prendre pour un écrivain.
Chapitre quatrième, and everything fall apart.Faisons le point, Mr et Mrs McKinnon prenaient une retraite bien méritée, à 30 ans Lewis était fraichement marié, écrivain plus ou moins au chômage. Bonnie avait 27 ans et intégrait la police scientifique, Blair, 25 ans, partait pour le Pérou avec Frank son amoureux, Effie 23 ans squattait à la fac et Lily devenait mannequin (posait pour La Redoute...). Lana, 29 ans, commençait à parler bébé. On aurait pu croire que c'était une bonne époque. Tout au contraire mes amis. Parce qu'en réalité, ce fut la pire époque. Lana et Lewis s'éloignèrent. Discrètement, sinueusement. Alors que les éditeurs de Lewis tapaient du poing sur la table pour un nouveau roman à éditer et que toutes les sœurs McKinnon faisaient des siennes, un soir Lana rentra pour annoncer une grande nouvelle. Et Lewis tomba de haut, de très, très haut.
« Quoi ? Tu me plaques pour un mec qui s'appelle Ranulf ? » Lana leva les yeux au ciel, excédée. Elle était en plein désespoir, très en colère et lui... faisait encore une fois une remarque en dessous de tout.
« Wis, j'ai essayé j'ai vraiment essayé de sauver notre histoire, ça fait des années que j'essaie mais... avec ces histoires de bébé qu’on n’arrive pas à avoir, tes soeurs qui sont insupportable, et... tes stupides idées de romans je... je suis restée fidèle mais... je me rends compte qu'il me rendra plus heureuse que toi et je voulais rester... loyale et t'en parler avant de... » Lewis avait la bouche entrouverte. Sœur, idées nulles, pas de bébé?
« Non, sérieusement, il s'appelle Ranulf ? » Lana soupira bruyamment et tendit le sac qu'elle avait préparé pour Lewis, afin qu'il quitte leur appartement.
Evidemment, Lewis avait fait une petite crise de déni ce soir-là. Le lendemain matin il suppliait Lana de revenir, la semaine qui suivait il comatait et pleurait sur le canapé de Bonnie, son mari -Perfect Bob, un banquier respectable- et leur fils Damian, 5 ans. Et quand la maison d'édition téléphona à Lewis pour mettre fin à leur contrat, ce fut vraiment le coup de massue.
Pour son trente-troisième anniversaire, Lewis était chez sa sœur Bonnie, un cookie dans les mains en face de son neveu. Bob était au travail, Bonnie en rentrait.
« Bon sang Lewis, bouge-toi ! » Râla Bonnie tout en envoyant une grande enveloppe.
« C'est pour toi ! » Lewis ouvrit l'enveloppe, les papiers de divorce. Ni une ni deux il se mit à pleurer.
« Mon Dieu... ça fait sept mois que vous êtes séparé tu devais bien t'en douter. Bon, range moi ce cookie, j'ai préparé de la soupe. Et demain t'as ton entretient à la police d'état... Tu sais l'annonce d'archiviste que je t'avais refilé. »Et finalement, Lewis eut ce job d'archiviste à la police d'état. Un boulot atroce si vous voulez mon avis. Lewis s'épouvantait à chaque déposition qu'il lisait, se faisait maltraiter par ses collègues et s'ennuyait à mourir. Sa sœur ne se calmait pas, son neveu se moquait de lui, Bob l'ignorait, Blair était désormais en Argentine, Effie avait coupé les ponts et Lily zonait... Bref, ce n'était pas la joie. Mais lors des instants les plus sombres, l'espoir peut renaître. Car en lisant -à la sauvette- une déposition à classer : inspiration. Lewis retrouva son inspiration d'écrivain. Son prochain roman sera un roman policier, c'était désormais décidé. Voilà où il en était, en train d'essayer de sortir la tête de l'eau d'un divorce qui lui était tombé dessus, et cherchant l'inspiration dans un travail qui ne l'épanouissait pas du tout.